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Pauvre chef
d'orchestre !

Pauvre chef d'orchestre !

La Dépêche du Midi n’est pas responsable de toutes les âneries qu’elle publie : M. Jean Marc Ayrault interviouvé dans ce journal déclare que le premier ministre est le « chef d’orchestre » de « plusieurs musiciens ».

« Mais certains musiciens jouent souvent leur propre partition, au risque de saper l’autorité du chef d’orchestre ».

Pauvre M. Ayrault, qui ignore encore que dans tout orchestre qui se respecte, chaque musicien joue toujours sa propre partition !

23 octobre 2012

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Revue Reconquete n° 291
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291Sophie KelbrenerPour que chante le monde et que vivent les âmes

Pour que chante le monde et que vivent les âmes

Si la perversité et la cuistrerie de l'art contemporain constituent désormais un phénomène bien étudié, le problème de la musique contemporaine l'est, en revanche, beaucoup moins. L'AC (art contemporain) désigne en effet généralement les arts figuratifs, même s'il est évident que la musique contemporaine est l'une des branches de cet art contemporain. Sans doute le problème de la musique contemporaine apparaît-il plus marginal que celui des arts figuratifs parce qu'il est moins « visible » pour le grand public. Pourtant, la musique est fondamentale et omniprésente dans le monde actuel, il suffit de constater le nombre d'écouteurs greffés sur les oreilles des jeunes et des moins jeunes. Au supermarché comme dans la voiture, dans le bus ou chez le dentiste, en faisant son jogging ou les devoirs scolaires, toujours de la « musique » ; pour bien des personnes, le silence est devenu incongru, inconnu, voire insupportable. La musique joue donc un rôle central dans la vie de l'homme moderne, elle accompagne la plupart de ses pratiques quotidiennes et façonne son être intérieur. D'autre part, la fonction liturgique de la musique prouve la noblesse et la sacralité de cet art, d'où l'acharnement mis à le pervertir.

La musique contemporaine est peu connue du grand public parce qu'elle se situe dans la continuité de ce que l'on appelle la musique savante ou musique classique. L'écoute de la musique dite classique nécessite une certaine éducation de l'oreille et la majorité des personnes écoutent davantage ce que l'on peut appeler de la musique populaire, ou plutôt « musiques actuelles » (rock, métal, techno, etc.). Cette dichotomie explique sans doute pourquoi la musique contemporaine semble moins massivement imposée que les autres formes d'art (peinture, sculpture, architecture, théâtre, etc.), puisque les musiques actuelles opèrent déjà avec un immense succès la perversion des âmes et la destruction intérieure (et extérieure !) des êtres.

En revanche, les amateurs et professionnels de musique classique sont impitoyablement soumis à la tyrannie de l'art contemporain : la plupart des concerts symphoniques proposés par les opéras comprennent désormais une oeuvre contemporaine pour obliger les auditeurs qui souhaitent écouter un concert de musique classique à écouter de la musique contemporaine. De même, pour les radios consacrées à la musique classique (notamment France Musique) qui diffusent une grande quantité de musique contemporaine. Cela prouve évidemment l'échec de cette musique, puisque l'on est obligé de l'imposer pour qu'elle soit écoutée. Cela prouve également son caractère idéologique. L'on impose d'écouter de la musique contemporaine, mais on impose aussi et surtout d'en jouer. Dans les conservatoires en particulier, principaux lieux d'apprentissage de la musique, un morceau de musique contemporaine est imposé à chaque examen de passage d'un cycle d'apprentissage à l'autre, et surtout à chaque diplôme. Si l'on veut suivre une formation musicale reconnue, si l'on veut, le cas échéant, devenir un « professionnel » de la musique, la musique contemporaine est un passage obligé. La musique contemporaine tend même à devenir le critère discriminant de la réussite aux examens et concours de musique. De fait, la plupart des oeuvres de musique contemporaine sont très difficiles à jouer en raison de leur technicité poussée à l'extrême et de la transgression de toutes les règles habituelles de la musique.

DE LA VIRTUOSITE A L'ATONALITE La recherche de prouesse technique a en effet bien préparé le terrain à l'apparition de la musique contemporaine. Les concerts-spectacles époustouflants de virtuosité d'un Paganini ou d'un Liszt sont bien loin de la conception musicale d'un Couperin qui disait dans la douce langue de l'ancien français : « J'avoüeray de bonne foy que j'ayme beaucoup mieux ce qui me touche que ce qui me surprend. » Cette recherche effrénée de vitesse et de perfection technique, qui était encore une exception au XIXe siècle et même pendant une bonne partie du XXe siècle, est aujourd'hui l'un des
critères majeurs de la « qualité » musicale. Comme le disait avec humour un musicien ayant établi un catalogue des règles d'or de la musique d'ensemble : « Veille à obtenir le plus de n.P.S (notes par secondes) ! » L'organisation de concours musicaux de niveau international, de même que l'enseignement de la musique en conservatoire a fortement contribué à cette dérive en instaurant la compétition entre les musiciens. Il s'agit dès lors de battre des records, de « bluffer » et non plus d'entrouvrir pour les auditeurs la porte de son âme et de son coeur sur ce monde du « beau ». En 2011, par exemple, une pianiste suisse d'origine chinoise, Mélodie zhao, a « fait la une » de toute la presse musicale par son enregistrement des redoutables Études d'exécution transcendantes de Liszt à l'âge de 17 ans. Mais pourquoi chercher à jouer si vite, estce parce que l'on n'a plus rien à dire ? Le « brillant » a-t-il remplacé le beau ? Préfère-t-on le superficiel à l'essentiel ?

Le même constat peut être dressé concernant le son. À partir du XIXe siècle, les évolutions techniques ont permis d'améliorer la qualité sonore des instruments, en particulier des pianos. Ces « progrès techniques », comme on les appelle, sont bien entendus tout à fait appréciables, mais dès la fin du XIXe siècle, certains compositeurs (Debussy notamment) ont commencé à donner une place prédominante au son au détriment de la tonalité. Cette recherche esthétique pure a logiquement cherché à compenser son absence de sens par l'innovation à tout prix, autre caractéristique de la musique contemporaine. Les précurseurs de la musique contemporaine (Debussy, Scriabine, Schönberg, Webern, etc.) ont ainsi exploré le système tonal jusqu'à ses confins les plus extrêmes avant de le transgresser : c'est le début de la musique atonale.

L'un des premiers à s'affranchir de la tonalité, Arnold Schönberg (1874-1951) crée une musique où l'organisation de l'harmonie et de la mélodie est remplacée de façon théorique et systématique, par l'utilisation d'une série de sons, combinant les douze demi-tons chromatiques dans un ordre choisi par le compositeur. Le principe de cette musique sérielle est que n'importe quel accord peut succéder à n'importe quel autre, sans tenir compte de la succession de tensions et de détentes (ou dissonances résolues en consonances) résultant de la fonction harmonique de chaque note dans une gamme. Ainsi la hiérarchie et les lois « naturelles » de la musique sont abolies au profit d'une nouvelle rationalité établie par le compositeur. L'art n'est donc plus l'expression d'une beauté transcendante à travers un langage spécifique qui respecte des lois conformes à celles du Créateur mais la création même de l'homme qui renie son Créateur et prétend le remplacer. L'aboutissement de ce nouveau système de composition est le dodécaphonisme consistant en une série de douze sons « égaux en droit » qui doivent se succéder toujours dans le même ordre. on a d'ailleurs parlé à cet égard de « communisme des sons », terme révélateur de la nature tyrannique et idéologique de cette « nouvelle » musique. En effet, de l'égalité des sons arbitrairement imposée par le compositeur nécessitant une utilisation très réglementée résulte en définitive une absence totale de liberté et de créativité, caractéristique de l'idéologie révolutionnaire. Cette musique est donc bien à l'image du communisme : inhumaine, parce que mécanique, répétitive et ignorante de la réalité des règles de la création divine. Certains compositeurs, comme Edgard Varèse (1883-1965) revendiquent d'ailleurs leur appartenance idéologique au communisme : ce compositeur, ami de Lénine, explique en 1929, à propos de son projet de composition de l'oeuvre espace, qu'il s'agira d'une grande symphonie internationale et révolutionnaire, symbolisant « l'Humanité en marche » qui « (utilisera) ça et là des bribes de phrases empruntées aux révolutions américaine, française, russe, chinoise, allemande ».

L'exploration scientifique de la sonorité et la rationalisation de l'art s'est poursuivie tout au long du XXe siècle à travers plusieurs courants de musique contemporaine : le courant minimaliste utilise la répétition comme méthode de composition, la musique spectrale décompose le timbre musical en spectre sonore, les intervalles sont segmentés (on ne joue plus de la musique avec des tons et des demi-tons, mais avec des quarts de tons), le rythme est brisé par des « valeurs ajoutées ». Au fond, la musique contemporaine se caractérise comme une vaste entreprise de décomposition.

LA MUSIQUE CONTEMPORAINE, NOUVELLE TOUR DE BABEL À l'inverse de la musique sérielle s'est développée la musique aléatoire. Cette expression datant de 1951 désigne une composition qui comporte une part d'aléatoire et d'imprévisibilité. Ce type de musique est à rapprocher de l'expérimentation en sciences. Le premier compositeur à mettre en oeuvre cette technique de composition est l'américain John Cage (1912-1992) avec ses oeuvres Imaginary Landscape n° 4 pour 12 postes de radio et Imaginary Landscape n° 5 pour 42 enregistrements phonographiques (1951). Pour ce courant de musique, il s'agit d'utiliser le hasard comme moyen de production « d'événements sonores ». on peut légitimement se demander s'il est encore possible de parler de compositeur puisque celui-ci se contente de fournir quelques matériaux sonores et un mode d'emploi pour la mise en route.

L'écriture des oeuvres de musique aléatoire est pour le moins problématique. Quels symboles utiliser, sur quels supports, comment écrire ce qui doit être imprévisible ? André Boucourechliev (1925-1997), par exemple, s'est inspiré de cartes marines pour écrire ses partitions Archipels (1967- 72). Il s'agit d'un ensemble de cinq pièces (dont la dernière est intitulée, de manière significative, Anarchipel.) pour différentes formations instrumentales (quatuor à cordes, piano-percussions, etc.). Dans la pièce Archipel III pour piano et six percussions, chaque partie instrumentale est écrite sur une immense page d'un mètre sur 64 cm (on imagine la commodité d'utilisation de ce type de partition !) contenant quatorze séquences de notes de hauteur déterminée ou non, accompagnées d'indications de durées, de rythmes, de nuances, de mouvements, etc. Ces séquences sont disposées sous forme « d'îles » sur la feuille, d'où le nom de l'oeuvre. Les notes peuvent être écrites en toutes lettres, assorties de courbes graphiques pour indiquer le sens de la mélodie. Pour comprendre les signes employés par le compositeur, la partition comporte en outre une sorte de mode d'emploi au verso qui précise les modalités d'exécution. Chacun des interprètes peut jouer de manière aléatoire les différentes séquences, nous explique-t-on, mais ils doivent néanmoins se concerter car « chaque intervention doit être ressentie comme nécessaire », ce qui suppose une communication entre les musiciens sous forme d'appels verbaux, des signes de la main, des mots de passe, etc. L'une des caractéristiques de la musique contemporaine est justement que chacun des compositeurs invente un nouveau système de notation qu'il explique dans une notice souvent difficilement compréhensible. Quel orgueil de l'homme qui ne peut se conformer à aucune règle (ni même à un format de papier !) et qui prétend tout inventer, sans référence à aucun maître, aboutissant à une individualisation extrême de la composition et à un éclatement du langage musical, alors même que, par essence, la musique devrait être un langage universel ! C'est le châtiment de la tour de Babel.

Le paroxysme de ces oeuvres aléatoires a sans doute été atteint dans la fameuse oeuvre 4'33'' de John Cage, durant laquelle l'instrumentiste se produit pendant quatre minutes et trente trois secondes sur scène sans émettre la moindre note, la « musique » étant produite par les bruits de la

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